vendredi 13 février 2015

Erró, au Musée d'art contemporain de LYON



Guðmundur Guðmundsson dit Ferró puis Erró,  



Guðmundur Guðmundsson dit Ferró puis Erró,  naît en Islande en 1932. Son vrai nom me fait rêver de légendes islandaises, de sagas, épopées du Grand Nord et de cette terre de feu qui rougeoie ou se consume sous la terre cendrée, les brumes glaciales, évanescentes, l’obscurité peuplée de gnomes.

Comment a-t-il œuvré pour créer une peinture à l’opposé de ses origines ? Complètement à l’opposé ? peut-être pas !




L’abstraction des années 60 réclame une haute-voltige de l’esprit et n’intéresse pas Erró.
Après des études solides dans les divers Beaux-Arts de Reykjavik, d’Oslo, de Ravenne, il va revisiter et s’inspirer de Le Tintoret, Arcimboldo, Jérôme Bosch, Picasso…, les surréalistes, les dadaïstes…, les mangas, Superman…



Erró opte pour la narration reconstituée de son siècle en peinture figurative. 


Je résume. Il va utiliser une trentaine de tiroirs où il trie, classe, entasse tout document sur un même sujet politique, social ou artistique. Erró va ouvrir le tiroir du sujet-évènement, étaler, assembler et coller le sujet-esquisse qui devient un sujet-modèle. Il ne reste plus qu’à le peindre et il devient alors un sujet-scape.








Des scapes, des panoramas orchestrés déroulent, synthétisent la société de la mécanisation des corps, des esprits, de la pensée. Laquelle nous introduit aux scapes colorés et attirants sur la boulimie obsédante et enivrante de nourritures, de voitures, de sexualité. Encombrements massifs, besoins croissants, trop-plein.

En un mot : obésité de nous-mêmes et de notre société.

 L’accumulation, la compilation nous livrent sur une même toile les américains et irakiens lors de la guerre d’Irak avec en plein milieu le totem de la guerre, guerre à laquelle on veut toujours échapper mais en vain. Erró s’interroge sur la naissance d’Hitler ( le tableau a été acheté, paraît-il par le Musée de Berlin qui l’a tout de suite mis en réserve !) . Ici, les combattants d'une guerre, peut-être du Vietnam vont finir, sans le savoir, au milieu des piranhas.


Et puis, enfin, ce sont les beaux scapes de Van Gogh, Fernand Léger, Picasso, Magritte, Bosch… Là, mon amour de la peinture reprend le dessus. Plus besoin de feuilleter un livre …. Mais, « ceci n’est pas un Magritte », ne nous y trompons pas !


 

Pas de place pour la respiration dans cette peinture d’Erró. Il en est ainsi dans nos vies, remplies de portables, tablettes dans nos poches nous livrant à portée de main, de regard, d’écoute, les informations choquantes, alléchantes ou ciblées en temps réel.
Pour le plaisir des yeux et pour nous gaver, il a trouvé le filon, notre Erró. L’évènementiel dort ou repose dans un tiroir avant que surgisse l’enchainement de l’Histoire sur un scape. Arthur Danto a dit : « ça, c’est le pop baroque »
Mais par ses toiles, Erró dénonce et ça m’intéresse. Comment consentons-nous au réel ? Quelle position avons-nous face à l’influence et l’affluence des images ? Son œuvre baroque, immense, utilisant montages, collages, a anticipé la technique informatique.

Mais où sont mes brouillards, mes tendres éclats, mes demi-teintes que je continue à chercher et savourer dans toute peinture ? Allons ailleurs ! Merci de votre accueil souriant, Monsieur Erró.




 



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