jeudi 6 juin 2013

Corpus Christi: cet étrange tableau de la Cène




La Cène
Le jeudi saint, c’est ce repas que Jésus fait avec ses douze disciples avant d’entrer dans les souffrances de sa passion. C’est ce dernier repas où il bénit le pain et le vin, où il affirme que le pain est son corps, le vin est son sang et les donne à manger et à boire à ses amis en disant : « Faites ceci en mémoire de moi »
Les artistes du monde entier se sont emparés de cet événement.
A Fourvière, dans cette exposition « Corpus Christi », nous avons eu une toile très étonnante d’un anonyme du début du XVIIème siècle. Autour de la table, douze personnages bien vivants, joyeux,  bavardent librement, autour de Jésus bénissant le pain. Les mains très expressives, ouvertes vers soi ou vers les autres, indiquent, argumentent et dénotent un échange, un dialogue soutenu, un étonnement, un questionnement  appuyés par la gestuelle.
Dans une représentation artistique de la Cène, il est de coutume de chercher à découvrir les différents apôtres. Jean est bien reconnaissable à ses mains croisées sur sa poitrine, à sa tête penchée vers Jésus, à son regard que le peintre a su diriger vers l’intérieur, en contemplation. Pierre, est-ce lui, à droite, dominant un peu les autres, à l’air tranquille, ne se doutant pas que dans peu de temps, il va renier son ami ? La conversation va bon train. Mais où est Judas ?
Dans la partie droite du tableau, tiens ! Tiens ! Nous retrouvons un autre Jésus, même visage avec des vêtements aux couleurs inversées, tunique rouge et manteau marron. Un alter ego, un jésus en miroir. Que fait-il ? Il s’adresse à nous par son regard et montre de sa main droite,  le personnage  devant lui, lequel est,  bien sûr, Judas. Judas, cheveux roux, manteau jaune recouvrant une tunique marron, met la main droite sur sa poitrine en prenant un air étonné. De la gauche, il tient une bourse bien remplie de ses trente pièces d’argent, le même prix que Joseph vendu par ses frères,  de l’Ancien Testament.
De manière évidente, Judas a entendu la demande de  Pierre,  par l’entremise de Jean à Jésus :
 - Demande-lui lequel de nous va le trahir.
La réponse de Jésus, sans nommer quelqu’un, est la suivante :
-  C’est celui qui mettra la main au plat. Luc ; 22, 10.
-  Moi. Mais pas du tout -  semble répondre Judas, du geste de sa main droite.
Sur cette toile, le peintre nous montre un Jésus qui nous regarde en désignant Judas. J’insiste, regardez bien la toile. Veut-il nous faire remarquer que c’est nous qu’il désigne comme un probable Judas que nous sommes en réalité, dans nos manquements, nos couardises, nos faux-semblants, notre lâcheté, nos compromissions, nos vaines gloires, nos concupiscences, notre avarice ou notre cupidité, c’est pareil !  Bref, tous nos nombreux désordres ….
Regardez encore les deux pieds parallèles de Judas et de Jésus ;  nous sommes nous aussi disciples du Christ puisque baptisés et confirmés, nous marchons d’un même pas avec lui et pourtant avec l’autre pied, le pied droit,  nous barrons l’accès à la table du Seigneur. Regardez bien, nous nous barrons l’accès à nous-même et aux autres aussi. Dans chaque Cène, nous sommes invités à prendre part au repas auquel nous invite le Christ, les artistes laissent toujours un passage où le spectateur va librement s’asseoir à la table du repas.
Cela ne vous rappelle rien ? Mais si, bien sûr, l’icône d’Andrei Roublev. L’unité de la Trinité comme l’unité de la Cène se passe autour d’une table, où chacun peut aller prendre sa place, toute sa place, rien que sa place,  recevoir la paix du Christ et avoir pleine part à sa joie, en union avec les trois personnes de la Trinité.
Après avoir médité, ruminé pendant près de cinquante ans les paroles et les actes du Christ, Jean nous l’a bien dit :
       Jean 15:11  Je vous ai dit ces choses, afin que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite.
Jean 14:27 Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix.

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